Le vieux bateau
Il était là, à quai, depuis longtemps déjà
Rêvassant solitaire aux appels des sirènes
Qui, dans les flots opaques, tourmentent les carènes.
Il se mourait à quai, pourrissant dans son bois.
Tous les oiseaux de mer, mouettes et goélands
Passaient de temps à autres, espiègles et pleins d’entrain,
Lui chanter les tempêtes, les rires des embruns
La java océane au cœur des rugissants.
A deux pas des amarres, à trois longueurs de bouts,
Eveillant son désir de longues ondulations,
La mer, lascivement, caresse sa flottaison
Puis d’une vague plus forte éclabousse la proue.
Et tandis qu’elle se moque de le savoir en peine,
Au rythme des marrées elle fait vibrer son ventre,
L’envie se coule en lui il ne veut plus attendre,
À s’en décrocher l’ancre il tire sur ses chaines.
Le vieux bateau de bois n’a rompu qu’un lusin
Mais déjà il se dresse et prononce le mot oui :
Pour revivre les courses et voguer sur la nuit
Laissant dans son sillage l’odeur des vents marins.
Il était là, à quai, s’étant longtemps cru mort
Epave nostalgique des combats pour l’honneur
Il n’avait plus vingt ans mais entendait son cœur
Se battre pour la vie, pour qu’elle remonte à bord.